Stranger, 2017
Vidéo numérique, 16/9, couleur, son
Formée au piano et à la guitare dans son enfance, et ayant joué dans plusieurs groupes punks, Naama Tsabar s’attache à l’analyse et à la déconstruction des codes des musiques amplifiées, mais aussi des structures de pouvoir que ces dernières véhiculent. Dans une perspective féministe affirmée, elle s’intéresse tout particulièrement à la culture visuelle et sonore du rock, ainsi qu’aux stéréotypes de genre liés à cette scène musicale majoritairement masculine.
Stranger prend pour point de départ une invention de l’artiste : une double guitare électrique, composée de deux instruments soudés dos à dos, et pouvant être utilisée par deux performeurs. Ceux-ci sont alors placés, non pas dans une position d’autorité – comme le veut l’image traditionnelle du guitar hero, dans le dispositif du concert de rock –, mais dans une intimité rendue nécessaire par la forme même de l’objet, qui oblige les interprètes à une négociation permanente tant sur le plan musical que physique. Montrant dans un premier temps l’artiste jouant seule de cet instrument à l’usage contre-intuitif, la vidéo se focalise ensuite sur son activation en duo, Naama Tsabar étant rejointe par la musicienne et ingénieure du son Kristin Mueller, qui achèvera seule la session. À l’effet miroir du métal brossé de cette guitare atypique répondent les positions des corps des performeuses, placés face à face, se mêlant, se poussant et se repoussant, jusqu’à parfois donner l’impression de fusionner en un personnage unique, qui présenterait en permanence son dos au public.
Philippe Bettinelli, 2024